La peau de l’ours 1 et 2

La peau de l’ours 1 et 2

16 janvier 2021 0 Par sgtpepere

Auteurs: Oriol et Zidrou

Editeur: Dargaud

Teofilio est un enfant de la balle qui vit aux États-Unis au début du XXème siècle. Destiné à une vie de misère, sa seule joie réside dans Roosevelt son ours avec qui il a vécu toute sa vie. Mais alors qu’il se produit dans un cabaret, un mafiosi se demande quel goût a le steak d’ours et colle une balle direct dans Roosevelt. Teofilio a le réflexe de la bonne réponse aux questions qu’on lui pose et devient un membre de la Famille au lieu de finir allongé à côté de ce qu’il considérait comme son frère. L’arrivée dans la famille de Don Pomodoro, si elle se fait toujours avec l’idée bien ancrée de se venger, ne sera pas désagréable puisque Teofilio fera la connaissance de la petite-fille du parrain. Mais est-ce bien raisonnable de s’engager dans une telle histoire d’amour alors que la soif de vengeance est toujours bel et bien présente ?

Quant à Andrea, il est recueilli par le Signior Damiani, aussi appelé “Orso”, après que son père se soit fait descendre par deux bandits et que sa mère ait été violée et se soit suicidée dans la foulée. Ce que Andrea ignore, c’est que l’ours si protecteur est en réalité le patron des deux voyous, mais pas le commanditaire de la double-mort. Pour Andrea, le réflexe de survie est le plus fort d’autant qu’il tombe rapidement sous le charme d’Aurélio, le fils de la famille. Un triangle amoureux se forme avec Natalia, la fille de l’ours et les choses deviennent bien évidemment plus compliquée au fur et à mesure qu’Andrea fait ses armes dans la famille.

Huit ans séparent ces deux albums qui partagent le même titre et bien entendu les mêmes auteurs. Je n’ai pas distingué le rôle de chacun car ça ne l’est pas non plus sur les albums. Mais Zidrou est connu comme scénariste et Oriol, comme dessinateur (espagnol pour la précision). Le fait de voir les deux noms ainsi “non classés” traduit bien qu’une bande dessinée ne peut se résumer qu’à la qualité de son scénario ou de son dessin mais bel et bien au mélange des deux.

Dans ces deux albums, totalement indépendants l’un de l’autre, on a droit à deux histoires de gangsters. La première fonctionne sur le principe du souvenir de vieux briscard qui, malgré une vie pas facile, se souvient avec bonheur de sa jeunesse et tente de transmettre ses souvenirs à un autre; tandis que le deuxième est profondément ancré dans l’action. Si les héros sont clairement différents par certains aspects, ils se rejoignent par le fait qu’ils soient tout guidés par l’amour (consommé, qu’il soit hétérosexuel ou homosexuel) et qu’ils gardent avec eux le fantôme de bon nombre de morts. L’osmose ne s’arrête pas et démarre même par les deux couvertures qui se répondent si bien alors que les histoires sont si différentes. En cela, les auteurs réalisent le tour de force d’allier une histoire qui tourne plus autour de la comédie dramatique à la limite du feel-good (avec certes des meurtres en série et des plus graphiques) et une histoire d’amour interdite dont le moteur alimentée par la passion et la jalousie est finalement plus classique.

J’ai beaucoup aimé dans les deux albums la tendresse qu’on éprouve pour des personnages pourtant loin d’être angéliques, voire même positifs mais l’écriture leur donne une poésie assez touchante, d’autant que les planches illustrent parfaitement cette poésie. Il faudrait être aveugle pour ne pas voir le changement dans les planches d’Oriol en huit ans d’expérience. Reste à savoir si ces changements sont particuliers au deuxième opus de la Peau de l’ours ou bien si il y a une transition observable dans les albums qu’ont réalisés les auteurs entre temps (Les 3 fruits et Natures Mortes).

Je crois que j’ai une préférence pour le style du premier album. Les personnages ont une trogne bien particulière et l’ensemble des planches me semble plus détaillé. Le deuxième opus penche plus vers l’impressionnisme, ce qui est artistiquement très intéressant mais que je préfère moins visuellement. Ceci étant, cela donne également une personnalité bien distincte pour chacune des histoires.

La Peau de l’Ours est un très bon diptyque, alliant scènes saignantes et moments de douce poésie, le tout dans une ambiance nostalgique mettant en avant la jeunesse perdue des héros. Deux albums conseillés (avec une préférence pour le premier, un peu plus drôle).


Un extrait du tome 1 sur le site de l’éditeur

Un extrait du tome 2 sur le site de l’éditeur