Spider-Man : L’histoire d’une vie
15 février 2021Scénario : Chip Zdarsky
Dessin : Mark Bagley
Editeur : Marvel Comics
Tout le monde connaît Spider-Man que ce soit par le biais des comics ou bien des films (et avec la vague Avengers et surtout le rapprochement entre Marvel Pictures et Sony, Peter Parker a connu un retour de gloire). Ainsi le jeune Peter Parker, mordu par une araignée radio-active, possède dorénavant des pouvoirs surhumains. Il laissera pourtant passer un voleur qui tuera son oncle Ben, le marquant définitivement de la maxime « De grands pouvoirs impliquent de grandes responsabilités. »
Bien, imaginez maintenant que Peter Parker vieillisse. Qu’il vive sa vie de scientifique en parallèle de celle de super-héros, qu’il ne passe pas toute sa vie à être un étudiant photographe gagnant une maigre vie en dépendant de Jonah J. Jameson. Imaginez également que le combat contre le Bouffon Vert, un Norman Osborn ayant appris son identité secrète, ne se conclue pas par la mort de Gwen Stacy. Cela changerait pas mal de choses, non ?
Eh bien, c’est pile poil où veut vous emmener Chip Zdarsky. J’ai découvert l’auteur en tant que dessinateur sur Sex Criminals, une série Image Comics, et il avait suffisamment de temps pour écrire quelques mini-séries (comme la dernière à propos d’Howard the Duck par exemple). On pourrait donc le classer comme un auteur avec une belle composante comique.
Zdarsky va donc partir sur un principe tout simple : son héros passe les années en en subissant le poids. Parallèlement à tout cela, les grands événements qui parsèment la série (Les guerres secrètes avec l’arrivée du symbiote, la Guerre des clones, la Civil War, l’entité totem araignée) s’enchaînent avec forcément quelques changements de scénario vu que certains éléments d’intrigue ont drastiquement changé le destin des Parker. Tout cela se conclura de façon fort logique sur une passation de flambeau avec Miles Morales.
Et c’est tout ? Oui, c’est tout. Et pourtant, c’est un sacré tour de force. Il est vrai qu’il faut connaître l’univers Marvel dans ses grandes lignes et grosso modo les grandes périodes de l’Araignée pour en apprécier les changements. Mais même sans cela, l’histoire tient parfaitement la route (avec peut-être un petit bémol en ce qui concerne les clones, mais apparemment, ça n’était déjà pas très qualitatif dans le matériau de base). Il y a une belle logique qui se poursuit tout au long de l’album, le fantôme de Gwen Stacy (si, si, mais en pas pareil) hante toujours Peter et le fond du personnage (que faire de tant de pouvoirs) est gardé intact.
Ce qui sera finalement le plus surprenant, c’est qu’un scénariste plutôt orienté comédie comme Zdarsky ne fasse pas plus blaguer Parker. En effet, la mélancolie du personnage et l’accumulation de problèmes concentrés en un album ne laissent pas le personnage respirer. A chaque combat, c’est une phase importante qui a lieu et Peter en a clairement gros sur la patate. Pas vraiment le moment de blaguer. Ce sera d’autant plus le cas que le seul moment où le héros plaisante sonnera bien faux.
A un récit de cette envergure, il fallait un artiste qui assure. Et c’est Mark Bagley qui sera choisi. Un dessinateur qui connaît bien Spider-Man avec en point d’orgue sa version Ultimate qu’il dessinera pendant 111 numéros en faisant l’un des plus longs runs sans changer de créateurs (en compagnie de Brian Michael Bendis). Il est aimé des lecteurs, associé à Spider-Man (qu’il a aussi dessiné à de nombreuses reprises sur Amazing Spider-Man) et devient donc un choix évident.
Je n’ai jamais été très client de Bagley et j’avoue que cette mini-série ne me fait pas vraiment changer d’avis. Certes son Parker est réussi tout comme Mary-Jane à différents moments de sa vie. Mais quand les personnages sortent de leurs expressions régulières, je trouve que le dessinateur se plante. Une Tante May horrifiée me revient en souvenir. Ceci étant, à bien y regarder, on voit que l’artiste est d’une belle régularité et propose des planches qui ne sont pas des planches de feignants.
Je me demande ce que j’aurais préféré. Est-ce que l’hommage aurait-été plus sympathique si chaque époque avait été dessinée par un artiste différent ? Est-ce que quelqu’un comme Marcos Martin (qui réalise une couverture alternative sur un numéro) n’aurait pas été un meilleur choix ? J’imagine que ces choix ont été observés par l’équipe éditoriale et mûrement réfléchis. Au final, j’aurais aimé avoir une autre patte graphique sur cette histoire pour qu’elle soit réellement un must-read concernant l’Araignée.
L’histoire d’une vie est typique du comic-book qui va avoir du succès, qui va parler aux fans sans forcément mettre de côté les nouveaux venus, même si ces derniers ne bénéficieront pas du même pouvoir d’évocation. Bref, un produit bien calibré et conçu pour avoir du succès.
Mais si il en a, c’est aussi parce qu’il est bien écrit. Parce que ce Peter Parker est aussi attachant que l’original, parce qu’il a autant d’embrouilles (si ce n’est plus) et qu’il choisit tout de même une voie honorable pour en sortir. Bref, comme je l’écrivais juste au-dessus, il manque une personnalité graphique marquante pour en faire un indispensable. Il n’en reste pas moins que c’est une lecture vivement conseillée.