Le fils de l’Ursari

Le fils de l’Ursari

25 janvier 2021 0 Par sgtpepere

Scénario et Dessins : Cyrille Pomès (d’après le roman de Xavier-Laurent Petit)
Couleurs : Isabelle Merlet
Editeur : Rue de Sèvres

Ciprian est un enfant d’une famille de Roms, un peuple itinérant qui se base sur le spectacle de rue. Son meilleur copain, c’est Ganan, l’ours de la famille, dressé par son père qu’on appelle un « ursari ».
Mais comme ils vivent chichement et souvent des fruits du vol, ils ne sont clairement pas bien vus. Alors que le voiture tombe en panne et que la population locale les somme de quitter les lieux, la famille de Ciprian reçoit une offre « qu’ils ne peuvent pas refuser ». En échange d’une somme exorbitante avec intérêt si le prêt n’est pas remboursé en temps et en heure, la famille va se retrouver à Paris. Les conditions de vie n’y seront pas meilleures et l’obligation de rembourser les usuriers va mener la famille sur le terrain de la fauche et de la mendicité. Mais Ciprian va passer par le parc du Luxembourg ou pas mal de parisiens se rencontrent pour jouer aux échecs. Ciprian n’y comprend rien mais est complètement fasciné par le jeu pour lequel il a clairement des prédispositions.

Roman publié à l’École des Loisirs, il n’est pas étonnant que l’adaptation paraisse chez Rue de Sèvres (la division BD de l’École des Loisirs). Je n’ai pas lu le roman donc je ne peux pas juger de la qualité de l’adaptation si les personnages sont plus ou moins bien écrits dans la BD que dans le roman.
Ceci dit, j’ai passé un bon moment avec ce livre.


Cyrille Pomès retranscrit bien les différentes situations que vont vivre la famille de Roms mais sans se voiler la face. Il nous les montre dans leurs actes quotidiens y compris les plus répréhensibles. Comme on comprend leur situation inextricable, on ne trouve jamais « qu’ils n’ont que ce qu’ils méritent » et cette formidable bande de citoyens qui vont se débrouiller pour leur donner un coup de main (ne serait-ce que la scolarisation dans une structure particulière) est remarquable.
Il y a certes quelques facilités scénaristiques, à commencer par le concept de départ faisant de Ciprian un génie des échecs et Le fils de l’Ursari est avant tout un conte pour enfants. La progression de Ciprian devient dès lors pour le lecteur une motivation à se dépasser, à suivre un héros au destin hors du commun (à la limite du shônen 😉) tout en gardant une composante sociale qui n’existe pas forcément dans l’esprit des jeunes lecteurs.

De prime abord, le trait de Pomès ne me séduit pas. La couverture est bien fichue mais l’intérieur des planches va révéler un trait plus dur, plus esquissé. Ceci dit, même si les planches semblent moins précises, l’auteur maîtrise parfaitement ses personnages qui ont tous une identité propre, que ce soit les joueurs d’échecs, l’enseignante, le sélectionneur ou bien la famille de Ciprian, il n’y a pas un visage qui ressemble à un autre. Et les seconds rôles ne dérogent pas à la règle. On reconnaît parfaitement chaque personnage. La mise en scène et les décors sont également bien réalisés.
Si Isabelle Merlet est créditée sur la couverture, il faut dire que son travail sur les planches est véritablement formidable. Il y a de la chaleur dans les planches ce qui permet de toujours garder une lueur d’espoir dans une histoire qui ne manque pourtant pas d’occasion de déprimer. Mais tout comme la famille de Ciprian fait face aux différentes épreuves, le lecteur réussit à garder la tête hors de l’eau.


Je ne conseillerai pas Le fils de l’Ursari à des lecteurs adultes qui sont a priori déjà bien au courant du sort du peuple Rom. Par contre, pour de jeunes lecteurs, je trouve cet album vraiment bien fichu oscillant entre réalisme social et conte de fées. De ce point de vue-ci, c’est une réussite.